Bilan du passage des tempêtes Ciaran et Domingos en Bretagne

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Bretagne - 07/11/2023

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La nuit du mercredi 1er au jeudi 2 novembre restera marquante pour la Bretagne. La tempête Ciaran frappera la Bretagne. On compare cet évènement sur notre région à la tempête Lothar en 1999 et parfois à l’ouragan de 1987 pour le Léon. Voici le bilan complet de cette tempête remarquable.

Une anticipation à la hauteur de l'évènement

Alors que la dépression Céline touche les côtes bretonnes le week-end des 28 et 29 octobre avec une houle importante dans un contexte de forts coefficients de marée, les modèles météorologiques anticipent déjà un phénomène intense pour la nuit de mercredi à jeudi ou jeudi sur la Bretagne. La communication des organismes météo s’oriente en réalité dès le jeudi 26 sur la future tempête attendue, ce qui représente une anticipation de six jours avant l’évènement.

Pour nous permettre d’identifier cette tempête avec autant d’avance la méthode a été celle-ci. Nous utilisons des modèles probabilistes (ensembles) qui convergeaient tous très en amont vers un décrochage significatif de la pression atmosphérique à deux reprises. Le centre dépressionnaire se trouvait systématiquement au sud des Iles Britanniques et le courant jet circulait sur l’Atlantique à haute vitesse pour les derniers jours d’octobre et les premiers jours de novembre. Les sorties des modèles météorologiques se confirment peu à peu et les services météorologiques britanniques nomment rapidement le nom de la dépression nous impactera : tempête Ciaran.

Quatre jours avant l’arrivée des vents violents, la tempête est prévue et la communication s’oriente vers un phénomène violent sur la Bretagne. Dans le week-end, près de 3 000 agents ENEDIS sont réquisitionnés en pleines vacances scolaires. Météo-France anticipe 48 heures la mise en place d’une vigilance orange puis 24 heures avant l’arrivée de la tempête le passage en vigilance rouge des départements des Côtes-d’Armor et du Finistère. Dans les médias, des messages sont relayés aux populations avec des incitations au confinement.

Comment la tempête s’est-elle formée ?

La tempête Ciaran s'avère être un véritable cas d'école de la formation de tempête explosive à nos moyennes latitudes. Nous avons, à ce propos, rédigé pour Le Télégramme un article spécifique sur la formation de Ciaran dont nous vous invitons à en lire les détails. 


La genèse de Ciaran a eu lieu sur l'océan Atlantique où "un vaste système dépressionnaire reliant la mer du Labrador jusqu’à l’Europe de l’Ouest a mis en place ce puissant courant-jet supérieur à 300 km/h sur l’Atlantique. Dans le même temps, un léger minimum dépressionnaire émergeait mardi au large de la Terre-Neuve en direction de l’Atlantique. L’interaction avec le jet a suivi mercredi en journée, avant un creusement explosif dans la soirée et la nuit suivante."

 

Comme indiqué également dans le Télégramme, la dépression Ciaran a eu un creusement explosif et est considérée comme une bombe météorologique. Arrivée à sa maturitée en entrée de Manche, les vents les plus violents ont été provoqués en seconde partie de nuit par la mise en place d'un sting jet "le courant-jet de basse couche formé durant la phase avancée de la dépression matérialisé par une forme de queue de scorpion sur les images satellites". Ces vents destructeurs s'étaient aussi produit lors de la tempête Zeus en 2017 sur le Finistère et le Morbihan mais sur une zone plus localisée. 

Des vents d'une violence exceptionnelle

La journée de mercredi est calme avec quelques averses passagères. Le ciel se couvre en soirée avec le passage d'un front chaud pluvieux puis d'un front froid très actif. Les précipitations s'accumulent notamment dans le Morbihan et en Loire-Atlantique. Elles sont suivies d'un temps très agité avec le passage de grains actifs et orageux. La soirée est rythmée par des orages et de violents bourrasques de vent. On relève jusqu'à 151 km/h à Saint-Malo (35) ou 144 km/h à Bignan (56). Jersey est frappé par le passage d'une tornade sur l'île. Les vents soufflent en tempête lors de la première partie de la soirée mais les vitesses de vent ne sont pas encore exceptionnelles même si quelques records mensuels de vent sont mesurés comme à Plougonvelin.

En pleine nuit, le sting jet traverse la Bretagne d'abord par le Finistère puis sur les Côtes-d'Armor et l'ouest du Morbihan. Dans une moindre mesure la Loire-Atlantique et l'Ille-et-Vilaine sont impactés. Les vitesses de vent mesurées atteignent des niveaux records. Quinze stations bretonnes afficheront de nouveaux records absolus devant les tempêtes 1999 et l'ouragan 1987. On relève notamment 163 km/h à Saint-Ségal, 161 km/h à Plabennec, 156 km/h à Brest ou encore 150 km/h à Pommerit-Jaudy. Le pic de la tempête est observé entre 2h et 5h le jeudi 2 novembre. Toutes les stations météorologiques enregistrent plus de 100 km/h ( sauf Machecoul et la Chapelle-Bouëxic) et sur les côtes les mesures atteignent 207 km/h à la pointe du Raz, 193 km/h à Plougonvelin et 195 km/h à l'île de Batz.

Alors que le vent commence à s'apaiser sur la Bretagne, une houle considérable s'abat sur les côtes bretonnes. Elle atteint 21 mètres à la bouée des Pierres Noires au large d'Ouessant en Mer d'Iroise. Les faibles coefficients de marée permettent à la surcote de ne pas faire de dégâts importants sur les côtes bretonnes malgré la houle qui concerne tout notre littoral.

Des dégâts considérables

Au matin de la tempête, le bilan est miraculeux. On déplore quelques blessés mais aucune victime n'est comptabilisée. Les dégâts les plus importants concernent les infrastructures notamment dans Brest et son agglomération. Plusieurs écoles resteront fermées pendant plusieurs jours. Le lycée Lesven très endommagé par la tempête restera fermé pendant plusieurs mois.

Le Finistère est le département le plus touché puisque des pans de forêts sont au sol. Sur la végétation, les dégâts sont considérables dans toute la Bretagne et des arbres centenaires ont cédé avec la force du vent. En forêt de Brocéliande, le célèbre hêtre du Ponthus n'est plus. C'est une part du patrimoine breton qui disparaît.

Les conséquences les plus importantes se trouvent sur le réseau électrique. L'anticipation des équipes d'ENEDIS était remarquable puisque 3 000 agents étaient prépositionnées avant le passage de la tempête.

Au lendemain de la tempête Ciaran, ce sont 769 000 foyers qui sont dépourvus d'électricité en Bretagne. Ce chiffre est plus conséquent que lors du passages des tempêtes Lothar et Martin en 1999. 286 000 dans le Finistère, 222 000 dans les Côtes-d'Armor, 195 000 dans le Morbihan, 78 000 en Ille-et-Vilaine et 17 000 en Loire-Atlantique. Quatre jours plus tard, il ne restait plus que 82 500 foyers privés d'électricité en Bretagne.

 

Depuis l'archipel de Chausey(50), à quelques milles au nord de Cancale (35), Hervé Hillard nous a adressé des photos de son barographe où il a mesuré l'évolution de la pression atmosphérique.

Hervé Hillard témoigne de ce qui s'est passé le soir où Ciaran a frappé: "Une dépression, comme son nom l’indique, est donc un phénomène météo où la pression diminue, ce qui est généralement synonyme de mauvais temps. Mais, si la valeur absolue de la pression signifie quelque chose (avec Ciaran, un minimum à 963 hPa est vraiment impressionnant, signe d’une dépression très creuse, donc très active), ce sont la valeur et la rapidité de la baisse de pression qui sont prépondérantes pour montrer l'intensité de la perturbation atmosphérique en approche. De même, à l’arrivée d'un orage, la pression baisse rapidement sur une faible zone et remonte tout aussi rapidement avec le front de rafales.Or, que voit-on ici ? Mercredi soir, de 22h30 à 23h, une baisse faramineuse de la pression, quasi verticale sur la courbe du baro. Ceci est le signe d’isobares extrêmement serrées, donc de vents très violents. On voit surtout ensuite un petit crochet qui remonte vers le haut en quelques minutes seulement, pour redescendre presqu’aussi rapidement. On est là en présence d’un phénomène orageux extrême, rapide, brutal, potentiellement tornadique. Ce qui est confirmé par le fait que l’île de Jersey, quelques minutes plus tard, a été touchée par une tornade (ou une trombe devenue tornade une fois sur l’île). Des vidéos prises non loin de Saint-Helier et à Saint-Clement montrent des aspirations de débris vers le haut, et de nombreux témoins parlent sans équivoque de mouvements tourbillonnaires intenses du vent. Par ailleurs, des chutes de grêlons ont également accompagné ce phénomène orageux extrême. D’après Jersey Met, une supercellule orageuse a bien frappé l'île, devenue toujours plus puissante après son passage dans les parages de Saint-Brieuc."

 

Après la violente tempête Ciaran, la tempête Domingos effleure la Bretagne

Les premières fortes rafales associées à la tempête Domingos ont commencé à se manifester sur le littoral d’Iroise le samedi 4 novembre en milieu de nuit lorsque le creux dépressionnaire atteignait 960 hectopascals au sud-ouest de l’Irlande. Des bourrasques à 117 km/h ont alors concerné Ouessant. Le littoral Atlantique a été touché samedi en cours de matinée avec des vitesses de 112 km/h à Belle-Île et de 115 km/h à la Pointe du Raz. Dans l’intérieur, le vent devenait déjà turbulent avec des rafales relevées à 85 km/h à Pleucadeuc et Kerpert et 86 km/h à Saint-Ségal. A la mi-journée, le vent monte en puissance à la Pointe de Chemoulin, tout près de Pornichet, qui enregistre une pointe à 133 km/h. L’après-midi, les averses orageuses deviennent nombreuses. Le ciel chaotique concerne toute la région et le vent sous les bourrasques et le tonnerre atteint 90 km/h à Rostrenen, 106 km/h à Carquefou, 125 m/h à Belle-Île puis 106 km/h à Lorient en soirée et 109 km/h à Saint-Nazaire.

Si toutes ces rafales paraissent presque dérisoires au regard des vents exceptionnels générés par la tempête Ciaran, elles interviennent 48 h après la plus forte tempête de ce début du XXI siècle en Bretagne. Fort heureusement, les coefficients de marée de 36 samedi soir ont fortement limité l’impact sur le littoral. En mer des creux supérieurs à 10-11 m ont concerné le Golfe de Gascogne.

C’est au cours de cette journée du 4 novembre qu’un agent Enedis venu en renfort du sud-ouest de la France pour permettre à la Bretagne de retrouver du courant a perdu la vie à Pont-Aven dans le Finistère. Dans la soirée et la nuit de samedi à dimanche, Domingos a frappé plus au sud, en direction de la Charente-Maritime et de la Gironde (147 km/h sur l’île de Ré et jusqu’à 152 km/h au Cap Ferret sans oublier un remarquable 144 km/h à Cognac située dans l’intérieur de la Charente).

 

Écrit par Stéven Tual, Sébastien Decaux & Jérôme Dréano, publié le 7 novembre (dernière actualisation le 16 novembre à 22h38)

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